|| CHAOS 1/2 ||

••• Les grands coups de pied dans la fourmilière qu'internet ne cesse de donner depuis son avènement, additionés à ceux qu'assènent les mobilités téléphoniques et informatiques, ont permis les discours les plus contradictoires, les prises de positions les plus extravagantes, les antagonismes les plus inattendus, les concours d'anathèmes les plus simplistes et les politiques les plus populistes, à l'égard de la dite 'crise du disque', concomitante - à défaut d'être prouvée consécutive - à la pratique massive du peer-to-peer. Soudain, l'inimaginable devenait réalité: on pouvait être qualifié d'ami des artistes ou ennemi de l'art, selon que l'on défendait ou non telle ou telle position, officielle ou non. La plus fratricide et la plus paradoxale des guerres se déclenchait, entre les artistes et les internautes, les artistes et les majors, les majors et les sociétés de gestion collective de droits, entre les artistes eux même, les internautes eux-même, utilisant parfois l'argumentaire adverse ! L'artiste, autrefois éminente voix de la liberté, devenait soudain l'allié de politiques liberticides ! Et l'immense communauté des internautes n'était plus qu'un grand méchant délinquant !

••• Il est temps, grand temps, de tirer leçon de ce que plus personne n'ignore, à savoir que le numérique a définitivement brouillé les fontières entre l'original et la copie, entre les 'créateurs' et les 'consommateurs', entre la maquette et le définitif, entre matières premières et matières élaborées, entre les nations, entre les époques, et donc, de manière plus pernicieuse et qui nous occupe aujourd'hui, entre le stockage, l'hébergement et la diffusion publiques. Le cyber-temps et le cyber-espace ne sont pas de simples tranpositions de leur contrepartie dans le cyber-monde. Ils sont de nouvelles dimensions en soi, brouillant désormais toute limite entre le 'dedans' et le 'dehors', entre l'avant et l'après, le 'réel' et le 'virtuel'. Sans une réelle prise de conscience de ces spécifités et de leurs conséquences, nous n'accomplirons rien de bon ni de durable. Les seules frontières que le numérique ne sera peut-être jamais à même de faire voler en éclat sont entre le riche et le pauvre, le juste et l'injuste.

••• Il est temps, grand temps, de se souvenir que, dans le domaine de la télé et de la radio (ironiquement voisine du streaming), l'auditeur jouit d'une 'libre consommation' des oeuvres, certes; mais aussi que cette gratuité n'est qu'apparente: une rémunération des ayants-droit est systématiquement générée, issue des redevances, subventions et/ou recettes publicitaires. Cela reste en vigueur aujourd'hui encore, quand bien même radio et TV sont devenues numériques. C'est reconnaître que cette apparente 'liberté' d'écoute a un coût; et qu'il est juste que quelqu'un paye. La rémunération est dûe même lorsque la diffusion est à but promotionnel: création et diffusion y trouvent un équilibre économique reconnu de tous. La numérisation de ces deux media n'a pas entraîné de facteur de 'gratuité' implicite, et personne ne s'en est ému: la 'liberté' a toujours un coût.

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Sun, Jan 3, 2010

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